23 août 2008

Le blogue d'un mort



Mardi soir dernier, j'arrive chez moi après une longue journée de brainstorm, la première depuis belle lurette. D'un geste machinal, je dépose ma casquette sur mon portemanteau, qui sert surtout de portecasquette, et j'appuie sur le gros bouton rond qui donne la vie à mon meilleur ami, 886, mon ordinateur.

Je l'ai appelé comme ça, parce que je l'ai acheté le 8 août 2006 (8-8-6) et parce que les ordinateurs pré-Pentium s'appelaient 286, 386 et 486, selon leur puissance (ou manque de puissance, en rétrospective). Je donne toujours un nom à mes ordinateurs. Le précédent c'était Dotcom et l'autre d'avant s'appelait Penty, parce que c'était mon premier Pentium.

Si vous ne l'aviez pas deviné, je suis un nerd.

Donc, je me branche sur Messenger pour voir si j'ai des e-mails (je déteste le mot "courriel"). Comme à l'habitude, quelques publicités et quatre messages qui essaient de me convaincre que je suis l'héritier d'un millionnaire du Burkina Faso. C'est la nouvelle mode, faut croire. Ils ont changé de stratégie quand ils ont compris que je ne voulais pas faire grossir mon pénis.

Ensuite, je vais faire un tour sur mon blogue. Tiens, quelqu'un a laissé un commentaire sur mon dernier billet. Sûrement le classique "Please click here. And here." Les commentaires sont tellement rares sur mon blogue, que même les spams sont bienvenus. Je ne les efface jamais.

Mais non, surprise, c'est un commentaire de Matthieu avec deux "t", un auteur que je n'ai pas vu depuis longtemps et qui dit simplement "Peux-tu m'écrire à mon adresse personnelle, s'il-te-plaît? Je ne suis pas certain d'avoir ton courriel... Merci." Comme toujours, je me mets à me poser toutes sortes de questions, à m'imaginer toutes sortes de scénarios. La dernière fois que je l'avais vu, il m'avait parlé de refaire une soirée avec les anciens du cabaret littéraire, c'est sûrement de ça qu'il veut me parler...

Je lui envoie le e-mail suivant, pour qu'il puisse me contacter : "Salut Dobble-Tee, j'ai juste une adresse et c'est celle-là. Tu veux m'envoyer des bêtises?" J'essayais d'être chummy, juste au cas. Je ferme 886 et je vais me coucher. Matthieu est un oiseau de nuit, alors j'aurai sans doute une réponse à mes questions en me levant le lendemain matin.

Et comme de fait, mercredi matin, j'avais un message de Matthieu. "Salut Dany. Malheureusement, ce sont de mauvaises nouvelles que je t'envoie. La mère de Nicolas m'a écrit parce qu'elle cherche à communiquer avec toi. Voici son message":

«Je me présente, je suis la mère de Nicolas, que vous avez sûrement déjà rencontré aux Auteurs du dimanche. J'essais de rejoindre Dany mais il n'y a pas d'adresse courriel sur son site. Malheureusement, je dois lui annoncer que mon fils Nicolas est décédé le 1er août dernier du cancer.

J'ai rencontré Dany ce printemps, au théâtre Corona avec Nicolas, lors d'un enregistrement d'émission. Nicolas communiquait avec Dany. Je dois aussi vous dire aussi que Nicolas aimait beaucoup vos livres et il les achetait tous. Pourriez-vous faire le message à Dany s.v.p. ? Je vous remercie à l'avance pour cette délicatesse.»

Je m'étais toujours demandé comment je le saurais si Nicolas devait mourir, puisque je n'étais pas en contact avec sa famille ni avec ses amis. J'avais seulement des nouvelles de lui quand je lui parlais sur Messenger ou quand il mettait du nouveau sur son blogue ou son Facebook. Et ça faisait plus d'un mois que Nicolas avait disparu du cyberespace.

J'annonce la nouvelle sur mon blogue, avant de partir pour une autre journée de brainstorm. Je viens d'apprendre que mon fan #1 est mort et maintenant je dois essayer de trouver des jokes. C'est ça la vie d'auteur.

Et finalement, en ce samedi après-midi, en attendant la visite de mes parents, je vais sur le premier blogue de Nicolas, celui que je n'ai jamais vraiment lu, constatant que tout ce qu'il me reste de lui, ce sont ses écrits. Et en voyant à quel point il mettait ses tripes dans ses textes, je trouve ma façon d'écrire trop terne et je décide de donner naissance à ce nouveau blogue.

1 commentaire:

Anonyme a dit...

Il m'avait souvent parlé de vous. De vos histoires, de votre façon de raconter et de votre talent en humour noir.

Le texte que vous écrivez ici est touchant et relate bien je crois ce que Nicolas pensait de vous.

Au plaisir de pouvoir entendre une histoire du "maître de l'humeur noir".

Marie-Ève, soeur de votre fan no.1, Nicolas.
(flounemeb@hotmail.com)